L’épopée des soldats de Mékinac racontée

SAINT-TITE.  Fruit de trois ans de travail et de la passion d’une vie, Jean-Pierre Frigon lancera ce samedi 5 novembre un livre retraçant l’épopée des soldats de la région de Mékinac qui ont participé à la guerre 1939-1945. 

Nos héros oubliés de la Seconde Guerre mondiale est un album richement documenté en histoires et en photos sur les cinquante hommes de la région qui se sont enrôlés dans l’armée canadienne, tous comme volontaires à l’exception de un conscrit.

L’ex-enseignant de l’école secondaire Paul-Le Jeune partait avec une bonne base puisque dans le cadre de la réalisation d’un calendrier historique en 2006 dans son cours d’histoire, il avait interviewé vingt anciens soldats, toujours vivant à l’époque, et recueillis plus de 200 photos.

« J’avais tout mis ça dans une boîte et puis la pandémie arrive. J’ai rouvert ma boîte et je me suis mis en tête d’écrire un livre sur ces hommes. Ce qui m’intéressait, c’est l’être humain qui est confronté à la guerre », raconte l’auteur qui a alors approfondi ses recherches initiales, en validant les témoignages des interviewés et en recueillant d’autres anecdotes.  

« Sur les cinquante soldats, j’en ai vingt sur qui j’ai recueilli beaucoup d’informations.  Vingt autres un peu moins et il y en a dix dont on sait seulement qu’ils ont été à la guerre. Ceux-là, c’est sans doute les meilleures histoires, car souvent, ils étaient tellement traumatisés par ce qu’ils avaient vu, qu’ils étaient incapables d’en parler à leurs proches. »

Décoré par le Roi Georges VI

Néanmoins, les histoires des autres militaires sont loin d’être banales comme celle de Paul-Émile Bourassa, de Lac-aux-Sables, qui a été décoré par le Roi d’Angleterre lui-même, Georges VI, pour avoir réussi à poser son avion en détresse sans faire de blessés. « Le roi ne se déplace pas habituellement pour un gars qui s’est cassé un bras », rappelle l’auteur.

Ou celle de Gaston Cossette qui a survécu à trois blessures avant de revenir au pays. Blessé d’un coup de baïonnette en Sicile, en Italie, le natif de Lac-aux-Sables a ensuite été évacué dans un hôpital militaire. Deux mois plus tard, il est de retour au front lors de la grande bataille de Casa Berardi au cours de laquelle le 22e Régiment perd 400 hommes. Fait prisonnier par les Allemands, il réussit à l’aide d’un camarade à assommer d’un coup de crosse de fusil son gardien avant de prendre la fuite. Après une semaine en cavale, les deux soldats parviennent à rejoindre leur camp. Entre-temps, persuadée qu’il est décédé, sa famille prépare déjà un service funèbre posthume à Lac-aux-Sables. Gaston Cossette poursuivra la guerre en Italie jusqu’à son terme, étant même promu au grade de sergent.

Natif de Sainte-Thècle, Rosaire St-Gelais a quant à lui participé au nettoyage du camp de concentration de Bergen Belsen, celui où Anne Frank est décédée. « Il était venu témoigner devant ma classe au début des années 2000 et les élèves avaient été bouleversés par ce qu’il racontait », se rappelle Jean-Pierre Frigon.

L’ex-enseignant relate aussi l’histoire des deux frères de Hervey-Jonction, Aldéric et Edgar Gagnon, qui ont épousé deux cousines en Angleterre avant de revenir dans la région avec leur épouse. « Edgar s’est noyé et sa femme est retournée dans son pays. Quelques années plus tard, sa cousine est allée la rejoindre avec son mari Aldéric. Il y a aujourd’hui des Gagnon qui parlent anglais en Angleterre », sourit-il.

Un tome 2 en préparation

L’écriture de ce livre a donné l’idée à Jean-Pierre Frigon d’y donner éventuellement une suite, celle des soldats de la région qui ont participé à la guerre en Afghanistan. « J’ai douze anciens élèves qui ont pris part à ce conflit. Ce n’était pas le même contexte que la Seconde Guerre mondiale mais ça a été aussi traumatisant. Les soldats qui en sont revenus en ont gardé des séquelles et c’est pire avec la perception de la population qui a l’impression qu’ils ont été là-bas pour rien. Tu as fait le débarquement de Normandie et tu es considéré comme un héros, mais tu as libéré Kaboul et on hausse les épaules », déplore en terminant Jean-Pierre Frigon.

Le lancement de  Nos héros oubliés de la Seconde Guerre mondiale aura lieu le samedi 5 novembre au Sportium de Saint-Tite à compter de 14h. Dans les prochaines semaines, Jean-Pierre Frigon ira présenter son album dans les différentes bibliothèques de la région.