Don d’organes: la Commission n’y va pas d’une recommandation du consentement présumé

MONTRÉAL — La Commission de la santé et des services sociaux portant sur les moyens facilitant le don d’organes ou de tissus ne fait pas de recommandation en faveur du consentement présumé, proposant plutôt que la Commission se réunisse à nouveau pour étudier la possibilité de le mettre en place.

Le consentement présumé consiste à donner le statut de donneur à un patient décédé, sauf en cas de preuve contraire, plutôt que d’exiger une preuve de consentement pour donner ses tissus ou organes.

La Commission souligne que les groupes d’experts entendus par les parlementaires étaient divisés sur cet enjeu. Plusieurs ont fait valoir que le consentement présumé à lui seul ne suffit pas à faciliter le don d’organes et de tissus au Québec. Pour que le consentement présumé soit garant de gains dans le processus de don d’organes, il est nécessaire de mettre en place un ensemble de mesures et d’avoir absolument une acceptabilité sociale.

«Sans acceptabilité sociale, le risque qu’il y ait de la résistance aux changements législatifs qui pourraient se traduire par une baisse du taux de don d’organes et de tissus», peut-on lire dans le document déposé mardi à l’Assemblée nationale du Québec par le président de la Commission de la santé et des services sociaux, Luc Provençal.

L’opposition officielle propose quant à elle qu’«à la suite d’une période de deux ans permettant une large discussion sociétale et l’implantation de l’ensemble des changements suggérés par cette Commission, le consentement présumé soit mis en place».

Le porte-parole de l’opposition officielle en matière de santé, André Fortin, a déclaré par voie de communiqué que le rapport — qui contient 11 observations et 15 recommandations — fournissait «de très bonnes pistes pour faciliter le don d’organes au Québec».

Il s’est dit toutefois déçu que la Commission repousse le débat au sujet du consentement présumé. «Alors que la Commission recommande de poursuivre les discussions et les consultations sans fixer de date butoir, les Québécois semblent beaucoup plus ouverts à cette mesure», indique M. Fortin.

Il poursuit en insinuant que la Commission a créé de «grandes attentes chez plusieurs patients» et que plusieurs «resteront sur leur appétit».

Registre unique et loi-cadre

Parmi les autres recommandations phares du rapport, la Commission recommande un «registre centralisé unique, comportant l’ensemble des données déjà existantes, convivial, gratuit et fiable pour permettre à toute personne d’enregistrer son consentement ou non-consentement».

On précise que l’inscription au registre ou la modification de son consentement doit pouvoir se faire en tout temps de façon numérique ou par des formulaires papier. De plus, les réalités culturelles propres aux Premières Nations et aux Inuit devraient être prises en compte dans l’élaboration du registre.

Actuellement, il existe trois façons de faire connaître ses intentions concernant le don d’organes au Québec: par la carte d’assurance maladie, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) et la Chambre des notaires.

Le registre de la RAMQ compte 3,72 millions d’inscriptions alors que celui de la Chambre des notaires en comprend 2,65 millions. Selon les données de Transplant Québec, le registre de la Chambre des notaires du Québec compte environ 15 % de refus de prélèvement d’organes.

Le rapport va par ailleurs de l’avant avec le souhait de Transplant Québec pour qu’il y ait qu’un seul «chef d’orchestre» qui coordonne le processus de don d’organes dans la province.

La Commission propose ainsi qu’«une loi-cadre sur le don d’organes et de tissus soit présentée et qu’un organisme responsable soit désigné pour sa mise en application». On indique également que cette loi-cadre devrait prévoir «un mécanisme de reddition de comptes périodique pour l’organisme responsable». On ne sait pas pour l’instant si l’organisme relèverait du ministère de la Santé ou l’agence Santé Québec.

Tout semble pointé vers la désignation de Transplant Québec à titre d’unique organisme qui chapeautera le don d’organes. Le rapport indique notamment qu’il est «compétent» et qu’il «détient l’expertise et la capacité d’opérationnaliser rapidement le processus de don d’organes au Québec».

La semaine dernière, le gouvernement a d’ailleurs annoncé que ce dernier s’occuperait désormais de la coordination du transport des organes à travers tout le Québec.

«Nous sommes heureux que les parlementaires emboîtent le pas à cette recommandation, et qu’ils témoignent de leur confiance envers Transplant Québec en observant que nous sommes un organisme compétent qui détient l’expertise et la capacité d’opérationnaliser le processus de don d’organes», a déclaré dans un communiqué la directrice générale de Transplant Québec, Martine Bouchard. Elle a ajouté qu’elle souhaite qu’un projet de loi en ce sens soit adopté d’ici la fin de l’année.

D’autre part, la Commission a fait le constat qu’il n’existe pas de procédure uniforme dans l’identification d’un potentiel donneur par le personnel de la santé en première ligne. Le processus de référencement varie d’un centre à l’autre et cela allonge les délais «entre l’identification d’un donneur potentiel et la rapidité de la référence à la direction des services professionnels».

On note aussi que l’épuisement des équipes professionnelles et le manque d’accès aux blocs opératoires alourdissent le processus de la chaîne de don d’organes et décourage «les équipes de soins à prioriser le prélèvement des organes chez un donneur potentiel».

Pour remédier à ces défis, le Commission recommande que «la loi prévoie un protocole uniforme, obligatoire et clair d’identification, de signalement et de référence des donneurs potentiels dans tous les centres hospitaliers du Québec». L’organisme désigné pour coordonner le tout pourra vérifier la conformité et l’application du protocole.

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