Mobilisation pour protéger une forêt exceptionnelle
SAINTE-THÈCLE. Une course contre la montre se déroule présentement pour préserver des coupes forestières une forêt ancienne située dans la MRC de Mékinac, entre les lacs du Jésuite et du Missionnaire, sur les territoires des municipalités de Sainte-Thècle et Lac-aux-Sables.
Mis sur pied par un groupe de citoyens, le groupe Les Amis de la Forêt ancienne des lacs Grandbois veut faire reconnaître un territoire de 6,7 kilomètres carrés comme une aire protégée par le ministère de l’Environnement.
« On parle d’une forêt d’un grand intérêt écologique avec des lacs et des milieux humides. On y retrouve notamment des peuplements forestiers avec de l’épinette rouge, une essence qui s’est beaucoup raréfiée dans le sud du Québec », mentionne Vincent Lamarre, biologiste et natif de Sainte-Thècle.
Sur le terrain, en prélevant des carottes dans certains troncs, il a répertorié des épinettes rouges âgées de plus de 200 ans et des bouleaux jaunes (merisiers) faisant un diamètre de plus d’un mètre. « C’est une forêt vierge qui n’a pas été coupée depuis la colonisation », renchérit Marie Audrey Nadeau-Fortin, également biologiste et co-porte-parole des Amis de la Forêt ancienne des lacs Grandbois. C’est comme se promener dans un musée vivant. »
Même si le territoire se trouve en forêt publique, il a toujours été préservé des coupes forestières intensives en raison du statut que lui réservait la municipalité de Sainte-Thècle. « On a consulté des procès-verbaux de la municipalité des années 1930 jusqu’à 1970 et on y fait souvent mention d’une réserve forestière qui servait aux agriculteurs qui avaient besoin de bois pour construire une ferme par exemple », explique Vincent Lamarre. Même la Consolidated Paper Corporation, qui a longtemps détenu les droits de coupe sur le territoire, semble toujours avoir respecté ce statut non officiel.
Avec son diamètre de plus d’un mètre, ce merisier a une âge estimé à près de 300 ans selon Vincent Lamarre. (Photo courtoisie)
Ce qui n’est plus le cas depuis quelques semaines alors qu’un entrepreneur forestier a commencé à procéder à des coupes pour le compte de Scierie Dion, de Saint-Raymond-de-Portneuf. « Il y a des secteurs qui ont été récoltés à l’intérieur du périmètre que nous voulons protéger, mais on a appris dans les derniers jours que les prochaines interventions sont reportées à l’hiver prochain », souligne Vincent Lamarre qui compte utiliser ce temps pour conscientiser la population, mais surtout le gouvernement.
Un dossier demandant de reconnaître la forêt ancienne des lacs Grandbois comme une aire protégée a été déposé l’automne dernier auprès du ministère de l’Environnement, mais le groupe de défense compte revenir à la charge ce printemps alors que Québec a annoncé dernièrement son intention de faire passer de 17% à 30% la superficie d’aires protégées au Québec. « On compte profiter de cette occasion pour revenir à la charge avec notre dossier qu’on a étoffé depuis l’automne dernier », mentionne Marie Audrey Nadeau-Fortin.
Des lettres d’appui
Les Amis de la Forêt ancienne des lacs Grandbois ont notamment obtenu l’appui de la MRC de Mékinac, des municipalités de Sainte-Thècle et Lac-aux-Sables, d’Environnement Mauricie, du Sentier national de la Mauricie, d’associations de riverains des lacs environnants, etc. « On a une dizaine de lettres d’appui pour le moment. Ça témoigne de la crédibilité de notre démarche », poursuit Vincent Lamarre qui souligne que seulement 4% de la superficie du territoire de la MRC Mékinac sont protégés pour le moment.
Le groupe de citoyens a également entrepris des démarches auprès de la direction de la protection des forêts du ministère des Forêts pour faire reconnaître la zone comme un écosystème forestier exceptionnel. « Ils ont reconnu que nos informations étaient intéressantes et ils vont aller les valider sur le terrain », souligne Vincent Lamarre.
Les deux co-porte-parole du groupe insistent pour dire qu’ils ne sont pas contre l’exploitation forestière, mais que ce site patrimonial doit être préservé afin de le faire connaître auprès de la population. « Notre approche est basée sur une démarche scientifique et de collaboration. Nous savons que Mékinac est une région où l’industrie forestière occupe une place importante. C’est aussi pourquoi nous nous limitons à une aire protégée de près de 7 km carrés que nous voudrions faire connaître auprès de la population en y aménageant des petits sentiers de randonnées », termine Vincent Lamarre.